« Les patriciennes représentes sur les fresques que les anciens Romains composèrent sont comme à l'ancre. Elles se tiennent immobiles, le regard latéral, dans une attente sidérée, figées juste au moment dramatique d'un récit que nous ne comprenons plus. Je veux méditer sur un mot romain difficile : la fascinatio. Le mot grec de phallos se dit en latin fascinus (...) Le fascinus arrête le regard au point qu'il ne peut s'en détacher (...)
La fascination est la perception de l'angle mort du langage. Et c'est pourquoi ce regard est toujours latéral.
(...) Durant les cinquante-six ans du règne d'Auguste, qui réaménagea le monde romain sous la forme d'un empire, eut lieu la métamorphose de l'érotisme joyeux et précis des Grecs en mélancolie effrayée. Cette mutation n'a mis qu'une trentaine d'années à se mettre en place et néanmoins elle nous enveloppe encore et domine nos passions. De cette métamorphose le christianisme ne fut qu'une conséquence (...)
Quand les bords des civilisations se touchent et se recouvrent, des séismes en résultent. Un de ces séismes a eu lieu en Occident quand le bord de la civilisation grecque a touché le bord de la civilisation romaine et le système de ses rites — quand l'angoisse érotique est devenue la fascinatio et quand le rire érotique est devenu le sarcasme du ludibrium. »
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